"Quel que soit notre destin, il habite les montagnes au-dessus de nos têtes."
Pietro
est un enfant de la ville. L’été de ses onze ans, ses parents louent
une maison à Grana, au cœur du val d’Aoste. Là-bas, il se lie d’amitié
avec Bruno, un vacher de son âge. Tous deux parcourent inlassablement
les alpages, forêts et chemins escarpés. Dans cette nature sauvage, le
garçon découvre également une autre facette de son père qui, d’habitude
taciturne et colérique, devient attentionné et se révèle un montagnard
passionné.
Vingt ans plus tard, le jeune homme reviendra à Grana pour y trouver refuge et tenter de se réconcilier avec son passé.
Hymne
à l’amitié, histoire familiale, ce texte splendide nous fait aussi et
surtout ressentir la force de la montagne, personnage à part entière,
capable de bousculer des existences et de transformer des êtres.
La montagne, moi ça me connait ! Bon, enfin, presque… Il est vrai que cela fait des années que je suis une adepte de randonnées en moyenne montagne. Et les Ecrins, et bien j’y suis allée il y a 3 ans. J’ai fait la traversée des Ecrins avec ses cols à 3000 mètres. Nous avons pu constater le déclin de celle-ci. La neige éternelle qui recule, des paysages magnifiques mais qui souffrent, des traversées de villages vidés de leurs habitants, l’abandon des alpages.
Donc cette lecture, ça m’a remué les tripes et n’a fait que confirmer ce que j’ai vu de mes propres yeux.
Ici nous avons deux amis : un citadin, un montagnard pur et dur. Pietro et Bruno, deux enfants qui partent en montagne, chacun avec leur vécu, leur ressenti. Pietro qui suit à regret son père nostalgique des sommets. Bruno qui vient se greffer à cette famille, enfant de la montagne mais qui n’est jamais allé plus haut que les alpages. Si Bruno admire ce père rude, parlant peu, valorisant l’effort et la ténacité, il n’en est pas de même pour Pietro. Pietro qui souffre du mal des montagnes et qui a l’impression de ne pas être à sa place, qui a honte de ce père qui se fait passer pour un montagnard et qui l’entraine dans des courses toujours plus haut, toujours plus vite… Mais voilà, ces souvenirs façonnent les deux garçons et les lient d’un lien indéfectible. Et même si Pietro semble ne pas aimé la montagne, cela reste sa drogue, sa bouffée d’oxygène.
D’après mes recherches, c’est un roman plus ou moins autobiographique puisque l’auteur, comme Pietro passait ses vacances à la montagne, loin de toute civilisation. Et un jour, Paolo Cognetti a fait comme Bruno, il a tout plaqué, pris de la hauteur et tourné le dos à la civilisation. Ce roman est un hommage à la montagne et à tous ces habitants. A ceux qui vivent, luttent et respectent ce qu’elle a à leur offrir. La montagne donne mais elle reprend aussi ; elle se laisse agresser mais un jour, elle reprend ses droits et fait trembler le monde. C’est une écriture simple, vivante, toute en poésie et respect. La chaîne des Ecrins est en fait le personnage central de ce roman. Protection de l’environnement et surconsommation se défit sous la plume de l’auteur. Véritable hymne à la contemplation, cette lecture nous offre un lâcher prise qui fait du bien en cette période mouvementée. Prendre le temps de regarder, d’apprécier ce que l’on a, de vivre en toute simplicité dans le respect et l’humilité. Mais c’est aussi un roman sur la transmission intergénérationnel. Nous ne sommes pas toujours réceptifs à ce que nos parents nous laissent ; il faut malheureusement attendre leur disparition pour prendre conscience de cet héritage. Il ne me reste plus qu’à visionner le film.
Ce roman, c’est un peu de douceur dans un monde de brut.
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