Notre Père qui êtes aux cieux, délivrez-nous du mal…
Mexico, Nouvelle-Espagne, XVIIe siècle. Quelqu’un – ou quelque chose – a pris possession du couvent de San Jerónimo. Religieuses et servantes sont retrouvées sacrifiées sur l’autel selon des rituels précolombiens sanguinaires, et la suspicion règne. Nulle n’y échappe. Car dans cette enceinte retirée du monde, entre fornication, autoflagellation et cauchemars blasphématoires, le péché est partout…
Alina, jeune novice insolente et rebelle, vient de prendre le voile. Au côté de Matea, sa fidèle domestique indigène, la voilà qui s’allie à sœur Juana, excentrique femme de lettres, pour trouver le coupable. Entre prières, lectures, leçons de cuisine et chocolats chauds, le trio mène l’enquête. Mais dehors, l’Inquisition est déjà en chemin et compte bien couper le mal à la racine…
Dans une atmosphère digne du Nom de la rose, le premier volume d’une nouvelle série de polars historiques, exotiques et mystiques.
Premier tome d'une nouvelle série : Les mystères de sœur Juana. Comme l'indique le titre, nous entrons dans l'intimité d'un couvent en Nouvelle Espagne.
Ici nous sommes dans un couvent de religieuses. L'inquisition veille. Alina, est envoyée dans ce couvent par sa grand mère souffrant d'avarice. Et oui, la dote de mariage d'une religieuse est moins importante qu'une dote de comtesse. Il va s'en dire que la jeune Alina y entre à reculons mais bon, on ne peut s'opposer à sa tutrice et au confesseur de celle ci. Dans une ambiance austère et lourde de silence, de regards en coin, notre novice croise dans le cloître une none étonnante. Érudite, poétesse à ses heures, sœur Juana prend Alina sous son aile. D'autant que le corps affreusement mutilé de sœur Félipa est retrouvé. D'autant, que ce n'est pas la première mort bizarre du couvent, d'autant que l'inquisiteur arrive !
Mêlant habillement l'histoire et l'Histoire, l'auteur intercale dans son récit des personnages et lieux ayant réellement existés, telle sœur Juana. Ce qui attire dans cette lecture, mise à part la couverture digne d'une enluminure, c'est son côté historique. Nous entrons de plein pied dans un couvent, avec ses us et coutumes, ses souffrances (tout le monde n'y est pas de son plein grès), son huit clos à l'odeur entêtante de l'encens. Ici est recréé en microcosme la société espagno mexicaine du XVIIe siècle. Une société engluée dans la hiérarchie du plus fort, raciste, où la religion et le pouvoir régentent tout. Vivre dans un lieu clos où tout le monde se connait, s'épie ne fait qu’exacerber rancunes et jalousie. D'autant que tout contact avec le monde extérieur se fait à travers une grille qui ne laisse deviner que des formes.
L'écriture est simple et efficace, tout comme l'intrigue. L’arrivée imminente des inquisiteurs nous fait tourner les pages les unes après les autres. Nous retenons notre souffle pour entendre les incantations chrétiennes et des autochtones pourtant bannies. Les personnages sont intéressant même si, comme on le devine, l’ascendant est pris par sœur Juana et la novice Alina. Deux femmes de savoir que l'on enferme dans une prison on ne peut plus efficace. Tire aussi son épingle du jeu, Matea, la domestique indigène qui a été imposée à Alina à son départ. Comme sa maitresse, elle n'a pas sa langue dans sa poche et ses yeux ne sont pas aveugles. Tout comme l'inquisiteur que je pense retrouver souvent au fil de cette série. Homme froid, brutal, obtus, misogyne qui ne peut regarder une femme non couverte de peur de partir directement pour l'enfer. Son aversion pour tout ce qui est croyance indienne ou créole nous fait comprendre pourquoi des peuples entiers ont disparu sous la dominance espagnole.
Comparé ce livre au chef d’œuvre d'Umberto Eco, "Le nom de la rose" est osé et non avenu. Je pense cette lecture plus proche des aventures de Frère Cadfael ou sœur Fidelma. Par moment le côté historique prime sur le suspens. Nous sommes dans une sorte de cosy, même si les meurtres sont affreux, cela reste soft sans déballage à outrance d'hémoglobine. Notre trio féminin utilise ses petites cellules grises et cela me convient et m'a fait passer un bon moment de lecture.
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